Trompe-l’œil: Tu ne me connais pas

Hello les gribouilleurs,

Ce matin je me suis mise en colère  et je suis fière de moi. Je n’ai pas procrastiné, j’ai réagi à chaud, j’ai défendu mon territoire. Ma fierté me surprend, mais elle est légitime. Parce que, pendant près de 30 ans, J’ai tu toute forme de colère en moi.  Pendant des années j’ai nié allègrement et avec fierté le fait que je pouvais me mettre en colère, que je pouvais être contre la manière dont on me traitait, que j’avais le droit à la parole. Je prenais la parole uniquement si ma vie ou mon travail en dépendait et dans ces moments-là, j’étais la petite fille devant le mur et je disais que ce n’est pas moi. Alors ce matin après avoir exprimé ma colère, j’ai dit NON et je suis fière de moi.

L’histoire commence par cette phrase: « Je te connais et tu es en mode autodestruction et tu as besoin que quelqu’un t’aime comme moi pour ne pas te détruire ». Dans ma tête j’entends cette phrase et je la vis comme une attaque. Je l’ai déjà entendue, sous d’autres formes. Mais aujourd’hui, je ne vais pas dire OK. Je réponds et je me rends compte que ma voix est montée très haut, trop haut. Mais je ne me formalise pas et je continue le concert. Je refuse que qui que ce soit me dise ce que je dois faire de ma vie. Pire, un presque inconnu. Je suis en train de gribouiller la manière dont je veux être traitée. Je ne le fais pas de la meilleure des manières, mais je n’ai pas l’intention de m’excuser. Au contraire, j’ai l’intention d’apprendre à dire NON.

Pendant longtemps, j’ai cru que les autres avaient le droit de me dicter mon attitude, me dire quand je devais respirer, comment je devais respirer, si même, je pouvais respirer. Mon argument pour valider cet esclavage était l’harmonie du monde, il faut prôner la paix. Sauf que cette histoire marchait bien pour les autres. En ma présence, ils étaient en paix. Dans certaines de mes histoires, j’étais le havre de paix et pourtant à l’intérieur je vivais sur un champ de mines. Mes actes de paix me mettaient souvent en guerre contre moi-même. Je voulais des choses et les validateurs que je m’étais défini voulaient d’autres choses. Dans ma tête je passais toujours après tout le monde. Au début, “Tout le monde” se limitait à mes parents et à mes enseignants. Mais avec le temps la liste s’est allongée. Je m’adapterais en continu pour que les autres se sentent bien. J’emprisonnais les parties de moi que je considérais comme étant non acceptables. J’étais bienveillante envers tout le monde sauf moi.

Cette danse  bienveillance malveillance m’a emmené à un point de ma vie où je ne savais plus qui j’étais. J’étais adulte et j’étais incapable de prendre la moindre décision sans l’aval d’une personne extérieure. J’avais besoin qu’on me dise que ma coiffure était belle, que mon maquillage allait, que c’était la bonne tenue, la bonne formation, le bon métier, sinon je me sentais dériver, incompatibles avec le monde. Ma voix n’existait pas dans mon propre espace. Je me sentais comme l’outil d’un mauvais marionnettiste, tant j’avais l’impression que tout allait de travers.

Et un jour, devant l’étang de mes larmes, je me suis rendu compte que je ne pouvais plus vivre de cette manière. La guerre à l’intérieur me prenait trop d’espace. Au début, j’ai cru que je ne faisais que rompre avec mon copain. Mais au bout d’un an, je me suis rendu compte que j’avais décidé de rompre avec les besoins du monde. J’avais commencé à faire le ménage et j’ai découvert sous une tonne de poussière, sans voix et épuisée, une « moi » qui ne demandait qu’à rentrer chez elle. Un être  puissant qui avait besoin de liberté et  qui ne demandait qu’à vivre.

La leçon que j’ai apprise est la suivante, si vous recevez plus de critiques de vous-même que des autres, posez- vous un moment et demandez-vous s’il s’agit vraiment de vous ou si vous avez invité une horde de démons mangeurs de vie dans votre tête. Et comme ce sera le cas, chassez-les, vous êtes chez vous. Votre tête, votre cœur, c’est votre maison et c’est à vous de décider. Votre maison a été conçue pour la paix, pas pour l’inquiétude. Votre maison est un espace de décision et non de jugement. Vous y êtes en sécurité, que rien ni personne ne vous fasse croire le contraire. Dans « Dare to Lead », Brene Brown nous dit « Si vous rejetez toutes les remarques, vous arrêtez de grandir, si vous prenez en compte toutes les remarques, ça fait tellement mal que vous êtes obligés et créés une armure et de vous défaire de votre vulnérabilité et finalement de voter humanité ». Votre première bénédiction, c’est d’être en vie. Le reste, c’est un bonus. Ayez le courage de faire le ménage, lavez chaque part de vous que les autres n’ont pas su accepter et vivez. Après tout, un jour, vous ne serez plus ici.

Le projet des gribouillis d’adultes a germé dans ma tête il y a des années, mais je n’avais jamais eu le courage d’aller jusqu’au bout. J’avais toujours l’excuse parfaite. Le processus qui m’a permis de dire NON ce jour-là est le même qui me permet de rendre publics ces textes. Alors la prochaine fois que vous penserez que vous n’avez pas votre place ici, pensez à moi. Vous avez le droit de faire le ménage. 

Je vous aime, beaucoup, passionnément, mais pas à la folie.

Photos par Adrian Fernández on Unsplash

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