J’ai eu 35 ans cette année et j’ai pris la décision de ne pas faire de fête pour marquer ce cap. Je voulais passer un moment avec moi-même et célébrer les pas que j’avais faits. Oui, j’ai célébré sobrement 35 années passées à sillonner un petit bout de cette terre. Les mois qui ont précédé ce moment, je n’avais pourtant pas envie d’avoir 35 ans. Mes insécurités semblaient accentuées. Je n’ai pas arrêté de me demander ce que j’avais accompli. Je regardais la vie des autres et je pouvais voir tout ce qu’il manquait à la mienne. Je n’étais pas jalouse, mais davantage en colère contre moi-même. Je me disais que je n’en avais pas fait assez. J’ai fait quelques allers-retours dans cette réflexion (ou cette conclusion) pendant un moment.
Et puis, sans pouvoir expliquer pourquoi, mon regard s’est porté sur moi, sur ma vie. Sur les fleurs qui ont poussé sur certains champs de bataille qui m’ont pris quelques années. Je me suis rappelé que pendant plusieurs années la santé et moi étions souvent en désaccord. J’ai regardé les fleurs de la confiance qui s’étendent de plus en plus dans ma vie. J’ai vu le résultat d’années de travail. J’ai vu la joie sur mon visage, qui s’est tellement gravée que j’ai une fossette qui n’existait pas pendant mes années d’adolescence. J’étais en vie, j’étais en santé, j’avais tous mes membres, un toit sur ma tête et bien plus d’amis qu’il m’en faut. J’avais vécu et j’avais devant moi un boulevard de possibilités.
La vérité, c’est que dans ma tête, le programme qui avait été implanté n’arrivait pas à comprendre que ma trajectoire ne soit pas celle qui était attendue par le programme. Je n’ai pas le permis, je n’ai pas d’enfant, je n’ai pas de chat… (la liste est trop longue), alors le programme s’est mis à bugger. Je me regardais dans le miroir et dans le programme, je ne trouvais pas ce qui me ressemblait. Célibataire, épanouie et heureuse simplement. Alors j’ai laissé tomber le programme. J’ai mis mute aux voix qui me disent que je ne fais pas mon âge. J’ai décidé qu’avoir l’air vieille à 35 ans n’était pas une option acceptable dans mon programme à moi. Et oui, j’ai réécrit le programme.
La vie, s’il est vrai qu’il faut la planifier, il faut avant tout la vivre. J’ai créé mon univers et dans mon univers, ma vie continue, elle se renouvelle tous les jours, un cadeau qui arrive chaque matin avec la promesse du meilleur et de nouvelles leçons. J’ai refait le programme et j’ai décidé qu’être adulte ne se mesurait pas à la quantité de choses que j’avais à troquer en échange de l’attention des autres. J’ai revu mes priorités et j’ai décidé que j’étais qualifiée pour être au premier rang de ma propre vie. J’ai pensé à ma valeur et j’ai décidé que la validation des autres est inutile si on parle de ma vie. J’ai décidé que danser sous la pluie était un truc de super adulte.
Je suis adulte, mais je ne suis pas obligée d’avoir des insomnies. Je suis adulte, mais je ne suis pas obligée d’avoir le permis pour être reconnue comme telle. Je suis adulte, mais je n’ai pas à le prouver. Et même si je ne suis pas adulte, c’est ma vie, mon terrain de jeu à moi toute seule. Je sais, je sais, ma liberté ne s’arrête là où commence celle des autres. En fait non, ma liberté ne s’arrête nulle part. Sinon, elle s’arrêterait là où commencent les coups des langues perverses de ceux qui veulent m’asservir avec leur « tu devrais ».
Si vous vous trouvez à la croisée des chemins et que le mot échec vous colle à la peau comme une sangsue, commencez par faire un garrot pour stopper le flot des comparaisons. Révisez le programme qui tourne dans votre tête. Si celui-ci ne vous convient pas, effacez le code et écrivez-en un nouveau. Vous n’avez pas à rester malheureux. Vous avez fait de votre mieux. Vos parents vous ont donné ce qu’ils pouvaient. La société vous offre ce qu’elle veut. Cependant, vous êtes le bénéficiaire d’un millier de miracles à la seconde, et vous avez le pouvoir de changer ce discours. À 35 ans, vous avez la possibilité de recommencer à zéro. Vous avez le pouvoir de changer votre vie. Vous pouvez vous débarrasser de tout ce que vous n’aimez pas, même si cela signifie recommencer dans une maison vide. Et ceci vaut aussi bien à 35 qu’à 90 ans.
La seule personne qui a le pouvoir de vous faire mourir avant l’heure, c’est vous. Je vous propose de vivre à 1000 à l’heure. Lorsqu’elle est bien vécue, la vie vaut vraiment le détour. Je vous aime un peu, beaucoup, passionnément peut-être, mais pas à la folie (je me réserve ça à moi). Joyeux Noël les gribouilleurs.
Image : Photo de Upesh Manoush sur Unsplash